« Les cryptomonnaies ne font pas encore partie du modèle de la banque centrale. Il faut que nous soyons tous conscients qu’à chaque fois que nous achetons à l’extérieur, nous dépensons nos stocks de devises et fragilisons notre monnaie. Si les gens pensent que les crypto-actifs sont un moyen de préserver leurs épargnes, il ne faut pas qu’ils oublient qu’ils transforment le franc CFA en dollar ou en euro qui constituent nos stocks communs et affaiblissent ainsi notre monnaie », a indiqué le directeur général de l’exploitation de la Beac, Jean-Clary Otoumou.
Néanmoins, selon ce haut responsable, la réflexion « est toujours en cours » au sujet de la création d’une blockchain (technologie qui permet de garder la trace d’un ensemble de transactions, de manière décentralisée, sécurisée et transparente) ou d’une monnaie numérique de banque centrale. Mais nuance-t-il, « nous ne réfléchissons pas du même côté que les acteurs des crypto-actifs ou des fintechs ». Ces derniers estiment que le système bancaire est lourd et contraignant. Ils considèrent la blockchain comme un moyen sûr et agile et appellent à une régulation. « Aujourd’hui, la plupart des commerçants qui achètent en Asie passent leurs commandes et paient leurs fournisseurs en cryptomonnaie. Cela a l’avantage de réduire les procédures et les délais », explique le directeur général d’UBTS, Armand Gaëtan Ngueti, qui préside la Blockchain association Cameroon (BAC), une association qui promeut le soutien et l’adoption des monnaies numériques.
À en croire ce dernier, le marché de la Blockchain représente en Afrique des transactions annuelles de 100 milliards de dollars, soit plus de 60 000 milliards de FCFA à la valeur actuelle du dollar américain. D’après l’étude sur le développement de la cryptomonnaie et des activités relevant du système de Ponzi au Cameroun, présentée le 24 août 2023 par le ministère des Finances (Minfi), le Cameroun compte près de 900 000 utilisateurs de cryptomonnaies, soit 6,76% de la population active. Ce qui place le Cameroun au 11e rang africain d’utilisateurs de cryptomonnaies, classement dominé par le Nigeria (22,33 millions d’utilisateurs).
Malgré tout, la Beac maintient son opposition à la régulation de la cryptomonnaie alors que depuis le 1er août 2022, la Commission de surveillance du marché financier de l’Afrique centrale (Cosumaf) a, dans son nouveau règlement, sorti les cryptomonnaies du maquis sans toutefois leur accorder le statut juridique de monnaie. Même la République centrafricaine (RCA) semble avoir mis en berne l’utilisation du bitcoin comme monnaie légale.
Frédéric Nonos