2787 satellites sont opérationnels au 31 décembre 2020 selon l’association UCS (Union of Concerned Scientists), dont plus de la moitié lancés par les États-Unis. Les trois quarts des satellites en opération tournent en orbite basse (entre 500 et 2.000 km d’altitude), et sont utilisés pour les systèmes de télécommunication, d’imagerie terrestre ou la météorologie.
En exploitant les données des satellites Starlink, des chercheurs ont réussi à se localiser à sept mètres près, le tout sans aucune intervention du satellite lui-même. À terme, ce système pourrait permettre de construire un véritable système de navigation autonome, accessible à tous et entièrement gratuit.
Aujourd’hui, la plupart de nos applications de géolocalisation reposent sur les systèmes GPS ou Galileo, qui fonctionnent grâce à des satellites en orbite moyenne (entre 20.000 et 35.000 kilomètres). Ces derniers envoient des signaux radio vers la Terre pour signaler leur position, et le récepteur peut ainsi déterminer sa localisation précise par triangulation. Des systèmes très coûteux à plusieurs milliards d’euros. Une équipe de chercheurs de l’université de l’Ohio (États-Unis) vient pourtant de trouver un moyen complètement gratuit d’accéder à un service de géolocalisation : pirater la constellation de satellites Starlink, qui dispose déjà de plus de 1.700 satellites en orbite basse.
Il n’a ainsi fallu que 13 minutes et six satellites Starlink aux chercheurs pour se localiser à 7,7 mètres près, et ce à l’insu de l’opérateur. Les chercheurs n’ont pas utilisé les données des satellites eux-mêmes, mais le signal envoyé par ces derniers. Lorsqu’un satellite survole la Terre, il émet en effet un signal radio destiné au récepteur au sol. La fréquence de ces ondes radio est déformée par l’effet Doppler, qui fait que les ondes s’allongent ou se raccourcissent selon la distance (comme les radars qui mesurent la vitesse sur les routes). Ce décalage est proportionnel à la vitesse du satellite par rapport à l’utilisateur. En enregistrant plusieurs signaux sur une période donnée, cela permet donc de déterminer les paramètres orbitaux du satellite.
En utilisant leur propre antenne installée sur le toit du campus, Zak Kassas et ses collègues ont capté les ondes électromagnétiques de six satellites Starlink durant 800 secondes (soit environ 13 minutes), puis ont fourni les données à un algorithme qui a déterminé leur géolocalisation au sol avec une précision de sept à huit mètres. C’est certes moins bien que les applications satellites courantes (Galileo offre par exemple une précision de quatre à cinq mètres pour la version gratuite et jusqu’à 20 centimètres pour la version payante), mais cela reste suffisant pour bon nombre d’usages, soulignent les chercheurs qui ont présenté leurs résultats lors de l’assemblée annuelle de l’Institut de navigation GNSS à Saint-Louis. En collaboration avec l’US Air Force, l’équipe a également identifié l’emplacement d’avions à haute altitude à cinq mètres près. D’autres constellations de satellites en orbite basse ont aussi été testées, mais avec une précision moindre (autour de 23 mètres).
Le premier système de positionnement par satellites au monde, baptisé Transit et mis au point pour la marine de guerre des États-Unis, exploitait déjà l’effet Doppler des signaux radio émis par les satellites. Développé dans les années 1950, il offrait une prévision de 200 mètres environ. Le programme a été arrêté en 1996 avec le développement des systèmes GPS.
Les chercheurs auraient pu utiliser la même technique avec les satellites Galileo ou GPS, mais ceux des constellations de type Starlink survolant la Terre à une orbite plus basse (entre 550 kilomètres et 1.325 kilomètres), leurs signaux sont beaucoup plus puissants et moins sensibles aux interférences. Ils constituent donc la cible idéale pour ce genre d’expérience. De plus, au fur et à mesure que la constellation grandit (Starlink devrait compter à terme près de 12.000 satellites), la précision de ce système va s’améliorer, souligne Zak Kassas. Dans un futur proche, l’équipe affirme être en mesure d’estimer la position en temps réel (sans le délai de 13 minutes d’enregistrement) en utilisant seulement quatre signaux satellites Starlink.
À terme, cette technique pourrait constituer un véritable système de navigation autonome, alternative aux services de géolocalisation classique. « Le GPS peut subir des attaques de brouillage, ce qui est un problème croissant pour l’aviation », met en garde Zak Kassas. Les données GPS sont aussi manipulables et un pirate pourrait ainsi prendre le contrôle de la trajectoire d’un véhicule. « Certaines attaques ont déjà réussi à leurrer des drones militaires et civils, des navires ou même le pilote automatique de Tesla ». Ce système serait également plus adapté pour des applications comme le suivi des animaux équipés de colliers, où le signal GPS est souvent masqué par la végétation dense.
Dommage en tout cas pour Space X, qui opère les satellites Starlink et qui ne touchera pas un centime de cette application utilisant ses appareils.
avec Futura