Elon Musk, homme le plus riche du monde avec une fortune estimée à 300 milliards de dollars, soit l’équivalent du PIB de la Finlande et avec une Entreprise à 1000 milliards, représente cette génération d’entrepreneurs tout-puissants, mégalomanes, à l’instar de Jeff Bezos – patron d’Amazon – , devenus des empereurs ayant quasiment plus de pouvoirs qu’un chef d’État, qui ont dompté les technologies et veulent façonner le monde, le modeler dans l’avenir selon leur propre conception de la vie.
Pour Elon Musk, il ne fait pas de doute que l’humanité doive très bientôt s’exporter sur Mars et il se voit en leader de cet exode.
C’est d’ailleurs ce qui ressort en filigrane de ce portrait. Dominés par sa puissance financière et sa maîtrise d’une technologie toujours à la pointe, nous ne pourrons que nous plier, de bon ou de mauvais gré, à ses décisions, aux orientations qu’il compte donner au monde. En bref, un grand timonier sans aucune limite tel que Mao Tsé-toung n’aurait jamais osé se rêver.
Le documentaire De Tesla à SpaceX : le monde selon Elon Musk débute avec l’ascension rapide d’un geek né en 1971 à Pretoria (Afrique du Sud), atteint du syndrome d’Asperger, et qui a gagné ses premiers dollars en créant et en vendant un jeu vidéo lorsqu’il avait 12 ans. On passe très vite sur son enfance pour arriver en 2002, date à laquelle Elon Musk devient multimillionnaire après avoir revendu PayPal, le système de paiement en ligne. Car grâce à cela, il va pouvoir financer ses véritables envies et laisser libre cours à sa créativité. Celui qui a été bercé durant son enfance par Star Wars, Star Trek et toute la science-fiction au cinéma, va fonder, à 30 ans, sa société de transports internationaux SpaceX et bousculer l’industrie. Personne ne croit en lui et les industriels le prennent pour un utopiste. Mais, après trois lancements infructueux de sa fusée Falcon réutilisable, et au bord de la faillite car il dépense 10 000 dollars par jour, le quatrième essai est un succès. Il signe au nez et à la barbe de ses concurrents un contrat de 1,6 milliard de dollars avec la Nasa pour ravitailler la station spatiale internationale. Sa conception de la fusée du futur devance largement les autres constructeurs de lanceurs, en divisant les coûts de fabrication par cinq.
À l’aide de témoignages et d’images d’archives, le documentaire dessine peu à peu la personnalité d’Elon Musk. Mais il est regrettable que le film n’insiste pas sur le caractère facétieux du milliardaire et sur ses tweets, qui agitent le monde de la finance et les réseaux sociaux, et qui sont démentis peu après comme, par exemple, le rachat du club Manchester United. L’angle choisi ne le présente pas comme un magnat capricieux qui cède à ses envies. Au contraire, quand il crée ou rachète une société, il valorise et gagne de l’argent. Comme un Midas moderne, tout ce qu’il touche se transforme en or. Ainsi, après avoir financé Martin Eberhard et Marc Tarpenning, les deux fondateurs de la marque automobile Tesla, il prend le contrôle de la société. Aujourd’hui, l’entreprise vaut 1000 milliards de dollars et la Tesla 3 est la voiture la plus vendue au monde. Son sens des affaires lui a fait créer les «gigas factories», des usines gigantesques qui lui permettent de rationaliser les coûts. La dernière en date, à Austin, au Texas, couvre la surface de 930 km². On parle d’usine 4.0. Cinq sont déjà réparties dans le monde et Musk en prévoit douze au total, pour être au plus près de ses clients.
Rien ne semble donc l’arrêter. Agacé par les embouteillages, il twitte en 2013 pour annoncer qu’il va fonder une société de construction de tunnels. Aussitôt dit, aussitôt fait. Il crée The Boring Company et commence par Las Vegas, où il fait percer un tunnel de 4 km sous le plus grand centre de conférence du monde. Les usagers empruntent un escalator et arrivent à une sorte de gare, où des chauffeurs les emmènent en différents endroits du complexe, à bord de Tesla 3. Il creuse plus vite et moins cher que n’importe quel entrepreneur. Dans l’avenir, ces tunnels serviront aussi à embarquer du fret, des câbles de fibre optique, faire passer des piétons et des cyclistes pour éviter le trafic en surface.
L’aventure continue en 2015 avec la création de Starlink. Revenus estimés : 25 milliards de dollars par an. Le but : avoir accès à Internet partout dans le monde sans zone blanche, grâce à un maillage de satellites positionnés à 60 km d’altitude et donc plus bas que les satellites géostationnaires traditionnels. 12 000 satellites qui relaient en permanence les signaux devraient être opérationnels en 2025. Elon Musk en prévoit 40 000 au total. Un projet hallucinant alors que la Terre est déjà entourée de milliers d’objets en orbite…
L’hyperloop, un train à lévitation magnétique, capable de se déplacer à 1000 km, est aussi un projet qu’a relancé Elon Musk en 2013, et sur lequel travaillent plusieurs sociétés dont deux en France. Si cela semble encore appartenir à la science-fiction, rien ne dit qu’Elon Musk ne parviendra pas à ses fins. Comme en témoigne un spécialiste dans le documentaire, pour Musk, tout ce qui est dans la science-fiction est réalisable. Pourquoi pas ? Le patron de SpaceX a bien réalisé le rêve de Jules Verne en créant les fusées réutilisables…
avec le figaro