Menu Parlons Techs

Apprends Moi + -Des Formations en Ligne 100% à Votre Rythme, Montez en Compétence dès Aujourd'hui...



Publié Le 13 septembre, 2023 8:38 pm

Faute de concurrents aptes au vol, SpaceX est en quasi-monopole sur le segment des lanceurs lourds occidentaux. Il domine aussi largement le marché des constellations de connectivité en orbite basse, avec Starlink. Une dépendance qui inquiète les opérateurs, et même le client institutionnel américain.

Le chiffre, inédit, a de quoi interpeller. Alors que s’ouvre du 11 au 15 septembre à Paris la World Satellite Business Week, la grande conférence annuelle du secteur spatial, SpaceX a déjà réalisé 62 tirs se ses lanceurs Falcon 9 et Falcon Heavy depuis le début de l’année, soit à peu près la moitié des lancements mondiaux, et 95% des tirs de lanceurs comparables occidentaux. Même si elle est largement portée par les besoins propres de SpaceX (qui lance en majorité ses satellites de connectivité Starlink), la performance est remarquable. Le groupe a déjà plus lancé en neuf mois que toute l’année dernière. Si l’objectif d’Elon Musk de réaliser 100 tirs sur l’année apparaît ambitieux, le groupe californien va donc largement battre son record de 2022 (61 tirs).

La concurrence ? Elle apparaît plus que jamais larguée. Ariane 5, après le succès des deux derniers lancements de son histoire, est à la retraite. Sa remplaçante Ariane 6, longtemps annoncée pour fin 2023, a vu son premier vol reporté à 2024. Les rivaux américains de SpaceX patinent tout autant. ULA, coentreprise entre Boeing et Lockheed Martin, n’a effectué qu’un tir de Delta IV depuis janvier, et son nouveau lanceur Vulcan est sans cesse repoussé : il est désormais prévu, au mieux, en fin d’année. Le New Glenn de Blue Origin (Jeff Bezos), lanceur lourd prévu pour 2020, approche des quatre ans de retard. Le groupe a publié ces derniers jours quelques photos de son usine floridienne, mais la date du premier vol reste un mystère.

Hausse des prix

La Russie plafonne à une douzaine de lancements (dix de Soyouz, deux de Proton). L’Inde est à 6. Seuls les lanceurs chinois soutiennent un tant soit peu la comparaison avec SpaceX, avec 38 tirs de lanceurs Longue Marche depuis le début de l’année. Mais du fait de la réglementation américaine ITAR, ils ne peuvent lancer aucune charge intégrant des composants américains, ce qui limite drastiquement leur expansion internationale.

Cette situation de quasi-monopole de SpaceX inquiète les opérateurs. « L’accès à l’espace est extrêmement important pour Eutelsat, nous essayons donc d’avoir de multiples fournisseurs de lancements, soulignait la patronne d’Eutelsat Eva Berneke en juin 2022 au Paris Air Forum. Nous avons besoin d’un marché concurrentiel. » Le risque du monopole est double : une impossibilité à lancer les satellites dans les délais prévus, faute de lanceurs disponibles ; et une hausse des tarifs des lancements. 

SpaceX a d’ailleurs déjà augmenté ses prix, ce qu’il justifie par les effets de l’inflation. En 2022, le lancement de Falcon 9 est passé de 62 à 67 millions de dollars, celui du lanceur lourd Falcon Heavy de 90 à 97 millions. Pour les missions en « rideshare » (lancements de multiples satellites de petite taille), le prix au kilo est passé de 5.000 à 6.500 dollars en deux ans, soit une hausse de près d’un tiers. 

Dépendance du Pentagone

SpaceX, en position ultradominante sur le segment des lanceurs, l’est tout autant sur son activité de connectivité internet par satellite (Starlink). La constellation a dépassé fin août la barre des 5.000 satellites en orbite. Son nombre de clients devrait atteindre 2,2 millions fin 2023, selon le cabinet Euroconsult. Ce dernier estime le chiffre d’affaires de l’activité Starlink à 3,2 milliards de dollars cette année. A titre de comparaison, le plus gros concurrent, OneWeb, est à 50 millions de dollars de ventes sur les six premiers mois de l’année. 

Suprême humiliation, du fait de la guerre en Ukraine qui l’a privé des lancements prévus sur Soyouz, OneWeb, en cours de fusion avec l’opérateur Eutelsat, a dû  faire appel à SpaceX pour lancer les derniers de ses 618 satellites désormais en orbite. Quant aux autres concurrents sur le segment de la connectivité en orbite basse, comme Kuiper (Amazon) ou Lightspeed (Telesat), ils n’ont pour l’instant pas lancé le moindre satellite. Les premiers prototypes de la constellation Kuiper doivent décoller à partir du 26 septembre sur un Atlas V d’ULA. Les premiers lancements de Lightspeed sont annoncés pour 2024.

Même le gouvernement américain se découvre dépendant de SpaceX, devenu un énorme fournisseur de la Nasa et du Pentagone. Le groupe envoie vers la Station spatiale internationale les astronautes de la Nasa. Il met sur orbite une bonne partie des satellites GPS III, la dernière génération du système de positionnement. Il développe l’atterrisseur lunaire des missions Artemis de retour des astronautes américains sur la Lune, basé sur le vaisseau Starship. La Nasa et le ministère de la défense essaient de pousser la concurrence (Boeing pour les vols habités, ULA pour les lanceurs).

Plus de concurrence en 2025 ?

Mais la dépendance à SpaceX est extrêmement forte, au point que certains experts américains parlent de monopole. « Il n’y a qu’une chose pire qu’un monopole gouvernemental, c’est un monopole privé dont dépend le gouvernement, prévenait l’ancien patron de la Nasa Jim Bridenstine au New Yorker fin août. Je crains que nous ayons mis tous nos œufs dans le même panier, et c’est le panier de SpaceX. » John Holst, ancien officier des opérations spatiales de l’US Air Force, est sur la même ligne : « Le fait est que la concurrence ne peut rien faire pour le moment, et cela fait de SpaceX un monopole de facto », indiquait-il en juillet au Wall Street Journal.

Ce n’est pas Elon Musk qui s’en plaindra. La valorisation de SpaceX, selon CNBC, atteignait 150 milliards de dollars en juillet, soit un chiffre comparable à celles de Disney ou Intel, et une augmentation de 50% en deux ans. Selon le site The Information, le groupe prévoit de doubler son chiffre d’affaires cette année, avec 8 milliards de dollars de ventes, contre 4 milliards en 2022.

Quand ce monopole de fait prendra-t-il fin ? « En 2025, on peut imaginer que Ariane 6 et Vulcan seront arrivés sur le marché, avec une cadence solide », estime Arthur Sauzay, auteur de plusieurs rapports sur le secteur spatial pour l’Institut Montaigne. Pour le New Glenn de Blue Origin, on risque d’attendre un peu plus ». Mais SpaceX devrait, lui aussi avoir avancé, avec un lanceur géant Starship dont il assure qu’il va encore permettre de casser les prix. Un deuxième tir d’essai est prévu ces prochains jours depuis la base spatiale de Boca Chica (Texas), que Challenges avait visitée en juin dernier.

avec challenges




Apprends Moi + -Des Formations en Ligne 100% à Votre Rythme, Montez en Compétence dès Aujourd'hui...