Des univers parallèles au nôtre dans lesquels nous évoluerons et interagirons comme dans la vie réelle, nous livrant à de la sociabilisation, des jeux ou même à un travail. Tel est le nouveau Graal d’Internet qu’ambitionnent de réaliser des personnes comme Mark Zuckerberg : les « métavers » ou « metaverses ».
En anglais on parle de « metaverse » et en français on utilise plus couramment le terme « métavers ». L’étymologie du mot nous renseigne fort bien sur sa signification. « Méta » signifie « au-delà » et « vers » désigne le mot « univers ». Nous obtenons donc « au-delà de l’univers » ou « univers parallèle ».
La première apparition du terme metaverse a été dans Snow Crash, « Le Samouraï virtuel » de Neil Stephenson. Dans ce roman visionnaire publié en 1992, les citoyens utilisent des avatars numériques pour explorer un monde virtuel en ligne – ce qui est pour eux une façon comme une autre d’échapper à la réalité. Il se trouve que dans Snow Crash, l’économie mondiale s’est effondrée et les gouvernements ont perdu l’essentiel de leur pouvoir au profit d’un petit nombre de méga-entreprises. Le métavers est donc un moyen pour eux d’échapper au réel. Le héros du roman, Hiro Protagonist, y passe l’essentiel de son temps, via ses lunettes et écouteurs.
Le film de Steven Spielberg, Ready Player One (2018) relaye une certaine vision d’un tel concept : on y trouve le monde virtuel Oasis, dans lequel se plonge volontiers le héros du film. Toutefois, ce monde parallèle est avant tout dédié au jeu.
Avec l’avènement des NFT pour non-fungible token en anglais (objets numériques uniques), certains jeux vidéo en ligne ont commencé à être assimilés à des métavers, notamment The Sandbox ou Decentraland, dans lesquels chacun peut revendiquer un accès exclusif à une parcelle d’un territoire donné et intervenir comme bon lui semble sur son apparence.
Fin octobre 2021, Facebook a mis le concept sur le devant de la scène, lorsque Mark Zuckerberg a annoncé la création d’un tel monde parallèle. L’entreprise a même changé de nom au passage pour adopter celui de Meta et mieux marquer son intention de développer un environnement qui serait le futur de la sociabilisation sur Internet. Zuckerberg a décrit le métavers ainsi : « Vous pourrez y faire presque tout ce que vous êtes en mesure d’imaginer – vous rassembler avec vos amis et votre famille, travailler, apprendre, jouer, faire du shopping, créer. »
Il est à noter que Mark Zuckerberg a pris ses distances avec la vision développée par Neil Stephenson dans Snow Crash : « Dans ce livre, l’environnement est plutôt négatif. Je ne pense pas que cela se passera comme cela… » Pour Zuckerberg, le métavers apparaît comme une évolution naturelle de Facebook, avec une même vocation de réunir des gens. Nous pourrions, dans cette mesure, assimiler le métavers à un réseau social d’une autre dimension, dans la mesure où l’on peut y déambuler à sa guise, croiser des gens et interagir (se livrer à une partie de ping-pong), visiter des lieux…
Trois points paraissent essentiels pour ce qui est de la participation à un métavers.
Mark Zuckerberg l’a clairement laissé entendre : « Il sera nécessaire que les usagers se sentent immergés dans cet univers. » Ainsi donc, on se retrouve dans cet univers dès lors qu’on y entre. Toute la réalité perçue et entendue durant cette expérience est celle du métaverse. On peut toucher des choses et les ressentir.
Dans cette mesure, nous pourrions assimiler le métavers à une expérience de réalité virtuelle qui serait déployée à très grande échelle. Pour mémoire, la réalité virtuelle consiste à définir un environnement artificiel, intégralement créé à partir d’image de synthèse. Ainsi, dans un jeu tel que Indiana Jones – Eye of the Temple, tout un univers propre à cette saga a été créé. Après avoir enfilé un casque tel que l’Oculus Rift, HTC Vive ou encore le Valve Index, le joueur doit trouver la sortie d’un temple truffé de pièges.
N’importe qui doit pouvoir rejoindre le métavers à tout moment, et le quitter aussi instantanément. Et dans ce monde, on dispose de son avatar qui peut être une reproduction de soi-même ou bien un personnage artificiel que nous incarnons. C’est au travers de cet avatar que l’on se livre à des compétitions, des activités de formation ou même à un travail.
La maison dans laquelle on réside, les rues que l’on parcourt dans son quartier de prédilection, les objets que l’on possède, tout cela est là en permanence. Grâce aux NFT, on peut notamment disposer d’éléments uniques tels que des œuvres d’art exposées dans son salon, un véhicule particulier, une armure exploitable dans les jeux vidéo…
Il est probable qu’il y aura également dans le métavers des personnages pré-programmés assumant certaines fonctions sociales à l’image d’un stand d’information dans la vie réelle.
La participation à un métavers va supposer l’acquisition et l’usage de certains équipements ou objets réels comme virtuels :
Outre Facebook, parmi les grandes entreprises actives dans la création de métavers on trouve :
Les visionnaires de métavers nous renvoient généralement à un grand nombre d’années dans le futur, car un grand nombre de technologies existantes se devront d’être arrivées à maturité avant qu’un tel univers parallèle puisse être déployé. Si les accessoires de visualisation et les systèmes tactiles en font partie, il en est de même pour tout ce qui relève du haut débit. Outre la fibre optique, la 5G et peut-être même aussi la 6G sont des ingrédients indispensables d’une telle équation.
Pour ce qui est de l’intégration du métavers dans notre modèle de civilisation, on peut soulever maintes questions. Pour les contrées où le métavers sera en épanouissement, que peut-on attendre ? Un paradis artificiel permettant d’échapper à un monde réel plutôt que d’en affronter les problèmes ? Un outil de libération individuelle ou d’asservissement ? Un désastre écologique lié à la puissance de calcul sous-jacente à un tel système ? Il reste aussi à savoir si des régimes dictatoriaux autoriseront jamais l’accès à un métavers où chacun serait libre d’agir et de s’exprimer comme il le souhaite.
avec futura